par Groupeemnt du Mur Manteau
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4 octobre 2024
Sept ans après l’incendie tragique de Grenfell Tower, à Londres – une tour de logements sociaux construite en 1972 et qui comptait 24 étages – la commission d’enquête placée sous la direction du juge Martin Moore-Bick a rendu ses conclusions, sous la forme d’un rapport de 1671 pages. Comme de nombreux immeubles de l’époque, au Royaume-Uni, en France et ailleurs en Europe, Grenfell Tower était à l’origine dépourvue de toute isolation thermique digne de ce nom. Dans le cadre d’une réhabilitation esthétique et énergétique menée entre 2012 et 2016, le bâtiment avait été doté d’une ITE sous bardage. Par conséquent, l’émoi causé par l’incendie chez les professionnels de l’Isolation Thermique par l’Extérieur a été considérable, et des voix s’étaient élevées, y compris en France, pour dénoncer le principe même d’une ITE sur les Immeubles de Grande Hauteur (IGH). Or le rapport, publié tout récemment, ne met aucunement en cause le principe de l’ITE en lui-même. C’est, en fait, une extraordinaire série de fausses économies, de malfaçons et de négligences, aggravées par des intervenants malhonnêtes opérant dans le cadre d’une réglementation coupablement permissive, qui a créé le conditions de la tragédie du 14 juin 2017. Le rapport souligne que le Building Research Establishment, l’instance en charge de la réglementation applicable «… est co-responsable », compte tenu d’un assouplissement jugé rétrospectivement excessif des dispositions applicables à la réhabilitation des immeubles collectifs dans la période considérée – par suite d’une frénésie de dérégulation de la part gouvernement conservateur de l’époque. Le rapport est également sévère à l’égard du cabinet d’architecture, Studio E : initialement, les architectes avaient préconisé un bardage en zinc, avant d’opter pour un revêtement en aluminium composite, moins onéreux, sans tenir compte du risque accru que posait ce matériau. Mais c’est à l’égard de l’entreprise genérale, Rydon, des sous-traitants et des fournisseurs que la critique est la plus explicite. Le rapport précise que les fournisseurs «… ont eu recours, délibérément et de façon répétée, à des stratégies destinées à manipuler les essais, à en offrir des interprétations biaisées et à diffuser des informations eronnées ». Le rapport considère ainsi que des isolants et des composants à proscrire absolument dans le cas d’un IGH ont été utilisé sciemment, au mépris de toute considération sur le danger qu’ils posaient. Enfin, le bailleur social a été directement mis en cause, pour avoir exigé de l’entreprise générale des économies excessives ; elles ont contribué à l’utilisation de matériaux inadaptés et au recours à des intervenants incompétents. Rappellons qu’en France, la réglementation incendie applicable à la réhabilitation en ITE d’Immeubles de Moyenne et de Grande Hauteur (IMH et IGH) est particulièrement stricte, et cela de longue date : Pour les IMH (hauteur comprise entre 28 et 50 m, selon le décret n° 2019-461 du 16 mai 2019), l’Arrêté du 7.8.2019 modifiant l’Arrêté du 31.1.1986 impose le recours à des isolants d’Euroclasse A2-s3, d0 (laine minérale ou laine de verre) Pour le IGH (hauteur excédant 50 m, soit la catégorie à laquelle appartenait la Grenfell Tower, haute de 67 m), l’Arrêté du 30.12.2011 impose le recours à des isolants d’Euroclasse A2-s3, d0. De plus, un visa de façade délivré par le laboratoire Efectis ou par le CSTB est obligatoire.